VIRGINIE EN LAPONIE
À la table du Père Noël
La salle à manger du Père Noël était énorme. Il le fallait bien parce qu’il m’était impossible de compter le nombre de lutins. J’eus le privilège de m’assoir à côté d’Ilmari, enfin du Père Noël et j’eus la joie de trouver Kaïsa, enfin Mère Noël qui nous apportait un énorme plateau avec une dinde rôtie dessus. La table gigantesque était recouverte de victuailles.
Elle formait un cercle à l’intérieur du Dôme. Il y avait deux niveaux. Le premier niveau à notre hauteur pour y déposer nos couverts et notre timbale avec notre prénom dessus. L’étage du haut était amovible et pouvait tourner pour déplacer la nourriture jusqu’à nous. Ainsi, une fois que Père Noël avait approuvé un plat, n’importe quel lutin pouvait faire tourner le plateau de la table à sa hauteur et se servir. La moitié de la tablée était remplie de mets salés et l’autre de gâteaux, pâtisseries et sucreries en tout genre. Je pensais que je n’aurais jamais assez faim pour goûter à tout ce qui me faisait envie sur cette table, mais étrangement mon estomac semblait être sans fond, comme le toboggan qui m’avait conduit ici.
Ilmari, je préférais l’appeler ainsi, m’expliqua qu’ici la seule notion de temps était le compte à rebours pour le 24 décembre minuit !
Il faut apporter de la magie de Noël !
Il m’expliqua que pendant que les lutins chargeraient le traineau, nous allions ensemble préparer les rennes avant notre départ. Père Noël m’annonça qu’avant cela, nous nous rendrions dans son bureau afin qu’il puisse vérifier n’avoir rien oublié et pendant ce temps-là je devrais écrire une carte de vœux à Inkari et son père, ainsi qu’à Mikko. Il m’expliqua que nous déposerions la carte en passant, avec leurs cadeaux. Je voulus demander quels cadeaux, mais Kaïsa mis son doigt sur la bouche pour me signaler de me taire. Père Noël me demanda si j’avais encore d’autres questions et si j’avais assez mangé car la nuit serait longue, très longue ! Puis, il se leva en riant et me laissa seule avec Mère Noël.
– Dis, mois Kaïsa ? Pourquoi avez-vous accepté de me prendre chez vous cette nuit ? Puisque vous me connaissez, vous auriez dû savoir que j’allais faire la curieuse et…
– … et ?? Et si nous avions fait exprès ?
– Ah bon ! Mais pourquoi ?
– Ton cadeau !
– Mon cadeau ?
– Oui !
– Je ne comprends pas.
– Écoutes moi bien. Tu étais contente de venir en Finlande n’est-ce pas ? Toutefois, tu es déçue de ne pas être avec ta maman à Noël.
J’acquiesçai de la tête et attendis la suite.
– Eh bien, tu vas être chez toi pour Noël. Et tu vas réussir pleinement ta mission. Je suis certaine que tu vas trouver une superbe idée pour mêler la magie naturelle de la Laponie avec un peu de magie du Père Noël ! Les gens ont besoin de rêves. Ils ne croient plus à rien, mais ils cherchent sans cesse à s’en mettre plein les yeux. Tu vas leur donner du rêve Virginie. Tu verras, aie confiance en toi !
Un projet prend forme dans la tête de Virginie
– Je ne suis pas sûre de comprendre. Tu penses que je pourrais imaginer faire visiter votre maison aux gens ?
– Notre maison, certes non ! D’ailleurs, tu ne te souviendras que de l’essentiel, être allée dans une ferme de rennes. Par contre Rovaniemi est la porte du Pôle Nord, c’est une charmante ville qui a besoin d’être mise en lumière. Les lapons cherchent à vivre mieux tout en préservant leur richesse. Je suis certaine que tu trouveras avec tes amis que faire de tout cela.
– Mais oui, tu as raison ! Si les gens veulent du Père Noël, on va leur donner la magie de Noël à Rovaniemi ! Et pendant qu’ils chercheront le Père Noël là-bas, Ilmari et toi serez tranquilles ici. Il n’y a rien de mieux que de placer un secret aux yeux de tous pour le conserver à l’abri des regards !
– Tu as tout compris ma chère, me dit affectueusement Kaïsa en me tapotant la joue. Et maintenant, il est temps de préparer votre départ. Viens suis-moi !
Des vœux non exaucés !
Nous franchîmes à nouveau la grande porte voutée et traversâmes plusieurs ateliers. J’aurais tant aimé pouvoir rester plus longtemps et aider les lutins, découvrir tout les secrets d’ici. Je devais probablement m’estimer chanceuse d’être là. Combien d’autres humains avaient eu ce privilège. J’avais la tête qui me tournait un peu. Certainement à cause du vin chaud !
Nous arrivâmes dans le bureau du Père Noël. Il était en chaussons dans son fauteuil devant la cheminée et faisait la sieste. Mère Noël me fit signe de ne pas faire de bruit.
Je me baladai un peu dans le bureau en regardant partout. Les murs étaient remplis de dessins d’enfants. J’en vis un qui brillait d’une étrange lueur. Je m’approchai et je fus complètement bouleversée de voir qu’il s’agissait d’un de mes dessins. C’était l’année qui avait suivi le décès de mon père. J’avais demandé au Père Noël de me renvoyer mon papa. Bien entendu, je n’ai pas été exaucée. L’année suivante, j’avais écrit une lettre qui disait que si cette année-là, il ne me donnait pas mon cadeau, alors plus jamais je ne croirais en lui. Mais que s’il me donnait mon cadeau, alors je m’engageais à véhiculer la magie de Noël partout où j’irai. Sur la lettre, j’avais dessiné un perroquet vert qui parlait. Un gros point de suspension était écrit sur ma lettre d’enfant.
Compte à rebours
Alors que je relisais ma missive, de grosses larmes coulaient sur mes yeux. J’entendis alors derrière moi :
– Jacot aime Noël. Jacot aime Noël !
– Bonjour Jacot ! dis-je au volatile bavard.
– Bonjour Noël !
– Non, moi c’est Virginie !
– Bonjour Noël…
Ilmari se réveilla et je m’excusai pour le bruit. Il me dit que ce n’était pas grave et me demanda si j’avais rédigé mes cartes de vœux pour Inkari et son père ainsi que Mikko. Je demandai si je pouvais savoir qu’elle était le cadeau d’Inkari. Ilmari sourit et me dit qu’elle aurait bientôt un nouveau travail, mais en attendant elle et son père allaient recevoir un traineau et un bébé renne. Quant à Mikko, il recevrait un vélo neuf et un billet d’avion pour la Suisse. Je demandais au Père Noël si c’étaient leurs vœux préférés et il me répondit qu’ils venaient tout juste de faire ces vœux, à l’instant, en recevant ma lettre. Je regardai devant moi et je vis mes deux cartes se dématérialiser sous mon nez pour ne laisser derrière elles qu’une vague odeur de marshmallow.
– Bon, il est temps de partir ! Allez Virginie, allons-y.
Joyeux Noël !
Il m’entraîna sous le Dôme. Un immense traîneau avait pris place au centre. Je reconnus Rudolf à la tête du traîneau. Kaïsa me serra dans les bras et me dit d’embrasser Sofia et Maria pour elle car elle avait de l’affection pour ces deux femmes.
– Dans une autre vie, elles auraient pu être des Mères Noël, me dit-elle.
Je versai une grosse larme en entendant ses paroles et en lui disant au revoir. Les lutins m’aidèrent à monter dans le traineau et me couvrirent de couvertures en patchwork et de peaux de rennes.
– Joyeux Noël à tous ! Clama haut et fort Ilmari, enfin le Père Noël.
– Joyeux Noël, répondirent des centaines de petites voix.
– Joyeux Noël, Père Noël répondit Mère Noël en envoyant un baiser magique….
Le traineau se souleva, tout tourbillonnait au-dessus de moi. J’entendis encore distinctement le “Oh, oh oh” d’Ilmari alias Père Noël, j’entendis les clochettes des rennes. Je vis les étoiles, l’aurore boréale, la lune, et tout tourna encore, de plus en plus vite…..
… Dring, dring, dring !
Bon sang, quel est ce bruit encore ! Je me levai brusquement, la tête me tournait et j’avais un goût étrange de marshmallow dans la bouche. Sur moi, il y avait une grosse couverture en patchwork. Le téléphone; un téléphone sonnait !
Je regardai autour de moi et je réalisai avec stupeur que j’étais chez moi, au Lignon. Dehors, il y avait une épaisse couche de neige. J’ouvris la fenêtre et j’entendis un bruit de clochettes. Avais-je rêvé tout cela, n’étais-je jamais partie ?
Je refermai la fenêtre et j’entendis derrière moi une voix étrange :
– Ça sonne, dring, dring ! Ça sonne, Vir-gi-nie, ça sonne…
Rêve ou réalité ?
Je restai pétrifiée au milieu de mon salon. Je portais la longue robe rouge de velours que je m’étais achetée pour Noël avant mon départ. Dans un coin du salon trônait un magnifique sapin blanc tout décoré avec plein de cannes en sucre et autres décorations typiquement finlandaises. À côté du sapin il y avait une grande cage ouverte et un perchoir. Jacot trônait au milieu de mon salon. Le téléphone sonnait toujours.
– Allo ?
– Virginie ? Ah je suis content de vous entendre ma chère. Alors bien rentrée ?
C’était Marc. Je n’y comprenais rien du tout. Comment pouvait-il savoir que j’étais rentrée.
– Heu oui, je suis bien rentrée, je vous remercie.
– Tant mieux. Vous nous avez tous bluffé ici, Virginie. Mikko nous a appelé pour nous dire à quel point il a été impressionné par votre capacité à créer des liens et votre créativité. Il parait que vous avez un projet magnifique en lien avec Noël. J’ai hâte que vous reveniez au bureau pour tout nous raconter. Mais attention je ne veux pas vous voir avant le 5 janvier.
– Heu oui, oui, bien sûr. Merci Marc c’est très gentil. Oui, je vous expliquerai tout, promis.
– Parfait ! Ce n’est pas gentil pour vos congés, mais mérité. Mikko m’a dit de vous passer le bonjour d’Inkari et de son père. Ils vous remercient au nom de toute la communauté de Rovaniemi d’avoir trouvé l’idée parfaite. Et Mikko vous appellera au bureau le 5, à moins que vous n’ayez envie de l’appeler avant. Il m’a dit de, vous rappelez que normalement, vous avez sa carte privée ! Il ne vous en veut pas d’être rentrée directement de Rovaniemi. C’était important de passer les fêtes avec votre famille. L’invitation chez lui tient toujours pour une prochaine fois!
Jacot, ou le souvenir d’un Noël magique !
– Ah, et bien merci pour toutes ces informations. Ça me fait plaisir d’avoir de leurs nouvelles parce que… oh, excusez-moi, je crois que l’on sonne à ma porte.
– Oui, pardon, Virginie, je suis un bavard moi. Mon épouse vous salue et elle a hâte d’entendre votre récit de voyages. Peut-être que vous pourriez venir manger à la maison après Noël. En attendant, joyeux Noël Virginie, vous l’avez bien mérité !
– Merci Marc, joyeux Noël à vous aussi et à votre épouse. À bientôt.
– Ça sonne… Virginie Ça sonne !
– Oui Jacot, j’arrive !
J’ouvris la porte et maman, Maria et Franco me tombèrent dans les bras.
– Joyeux Noël Virginie ! me crièrent-ils, tous en cœur.
Je n’en revenais pas ! Ma table que je n’avais pas encore vue était remplie de délicieux plats finlandais. Il y avait du hareng fumé, du saumon, la fameuse soupe au saumon que j’ai tant aimé, des ragoûts mijotés, une dinde rôtie, du renne grillé avec des airelles, des fruits de toutes sortes et des desserts splendides ; on se serait cru à la table du Père Noël. Comme pour me confirmer que je ne rêvais pas, Jacot me dit :
– Joyeux Noël Virginie, Joyeux Noël d’Ilmari !

FIN !
Je vous souhaite à tous un joyeux Noël !
Stéphanie
Note de l’auteure :
Le village de Noël de Rovaniemi a été crée dans les année 1985. L’office du tourisme finlandais cherchait un projet pour favoriser un peu le tourisme dans cette région afin d’améliorer l’économie et soutenir le peuple Lapon.
Cependant, l’idée de créer un lieu dédié au Père Noël était déjà là, car en 1950, Eleanor Roosevelt, l’ancienne Première Dame des États-Unis, a visité Rovaniemi et a contribué à la construction d’une petite cabane en bois près du cercle polaire arctique. C’est cet endroit qui a été exploité et au fur et à mesure des années le lieu c’est agrendit.
Lorsque j’ai décidé de créer ma Nouvelle j’avais une idée un peu différente de la rencontre de Virginie avec le Père Noël. C’est en me documentant sur la Laponie et en découvrant l’histoire du Village de Noël que j’ai décidé d’attribuer ce projet à mon héroïne ! Après tout, elle l’a mérité, non ?
Je vous remercie pour votre fidélité et je vous serai très reconnaissante si vous pouviez me laisser un commentaire d’appréciation, ou non, en utilisant le formulaire ad-hoc. Merci et à très bientôt !